Le service d’oncologie de la clinique Pasteur à Toulouse, accueille une expo originale où le cancer est traité en bande dessinée. Man’, autrice de la BD, y raconte avec humour le combat qu’elle a elle-même mené contre son cancer du sein.

Comment vous est venue l’idée d’écrire votre histoire dans une bande dessinée ?

À la suite de mon opération, mon chirurgien m’a proposé de faire de l’escrime avec l’association Riposte. Elle permet de suivre gratuitement des cours d’escrime pendant 1 an pour rééduquer notre bras après une ablation du sein. Dans cette asso, j’ai rencontré d’autres femmes. On discute souvent de notre sentiment face à la maladie et moi je l’aborde toujours avec autodérision. Un jour, une des filles du groupe m’a dit « tu devrais utiliser tes blagues pour en faire une BD ». Je me suis dit pourquoi pas ! Je suis donc allée voir Maud, la dessinatrice, pour lui proposer mon projet. Une semaine après, on avait commencé.

Vous avez été suivie par la clinique Pasteur et des associations pour le cancer du sein. Vous y faites plusieurs fois référence.

Ils font un travail formidable. L’ablation d’un sein est une lourde opération aussi bien au niveau physique que psychologique. Ces personnes nous aident à retrouver un confort. J’ai été accompagné par le personnel de l’hôpital ainsi que par l’association ISGT, la ligue contre le cancer 31, Riposte et Gislène, une socio-esthéticienne, avant, pendant et après la chimiothérapie et l’opération. Imaginez si on ne faisait que la chimiothérapie puis que l’on rentrait directement chez nous ? Moralement, je ne sais pas si j’aurais tenu le coup aussi bien. Ils sont d’un grand soutien. Mon oncologue y est aussi dessiné. On a d’ailleurs représenté la salle de chimio comme une salle de shoot! J’espère qu’elle n’en fera pas une formalité et que ça la fera rire !

Les premières planches sont des dessins minimalistes, puis au bout de quelques pages, les personnages prennent du relief et de la couleur. Que signifie ce changement ?

Effectivement, on commence par des dessins simples, en noir et blanc parce qu’on apprend la maladie : on a beau savoir ce qu’est le cancer du sein, on ne le connaît pas réellement tant qu’on ne l’a pas vécu. Les pages prennent de la couleur et les personnages s’améliorent pour symboliser le processus d’un malade : on est dans le déni au départ et on finit par accepter. Ces dessins illustrent mon expérience avec la maladie. J’ajoute ce ton dérisoire à mon personnage car c’est une échappatoire pour moi. Et j’en profite pour encourager les femmes à se faire dépister. Ne pas le faire sous prétexte qu’on n’a peur est une mauvaise excuse. La peur n’exclut pas le danger. Plus tôt on se fait dépister, plus vite on est soigné et on peut éviter une ablation du sein. Cette BD, c’est aussi pour changer le regard sur la maladie.

À qui reversez-vous les bénéfices ?

Tout l’argent récolté sera donné aux associations qui accompagnent les femmes atteintes du cancer du sein : Riposte, ISGT et la ligue contre le cancer. Je souhaite les soutenir pour les remercier de l’aide qu’elles m’ont apportée et pour que d’autres femmes puissent bénéficier de ces services.

Quelle est la date de sortie de votre BD ?

Elle sort pour Octobre Rose 2021. Et quand celle-ci sera finie, j’aimerais bien en faire une avec des enfants. C’est-à-dire prendre de jeunes dessinateurs et chacun illustrerait une planche. Ce deuxième tome expliquerait le cancer aux enfants.

Aujourd’hui, quel est votre rapport vis-à-vis de la maladie?

Ça a été pour moi une renaissance ! C’est quand on est malade que l’on comprend l’importance de vivre. Vous savez, on a toujours peur de ce qu’on ne connaît pas donc on apprend à vivre avec. Il faut positiver parce que sinon on désespère. Et puis, on fait vite le tri de ce qui est important et de ce qui ne l’est pas. On change ! Un renouveau, c’est obligé.

Recueilli par Chloé Coculet.